Extraits d’un courriel envoyé par Madame K.L. députée de L. et M., pièce archivée au bureau des réélections chez L.R.E.M.
« Ma Mémé la plus mimi à moi, comme j’ai plein de temps depuis que je suis ici j’en profite pour t’écrire, les timbres sont gratuits, mais un mail ça va plus vite.
J’en reviens toujours pas que je suis députée !
Faut reconnaître qu’on se mouche pas du pied ici : café gratuit, bureau avec vue, assistants choisi par le parti, plutôt beaux mecs et qui causent le juridique mieux que moi. Et c’est pas dur ! Au bout du couloir il y a des types avec des chaînes autour du cou. Magali, qui est députée aussi pensait que c’était en hommage à l’abolition de l’esclavage. Mais non, il sont là pour faire joli, accueillir, indiquer les toilettes (qui sont à l’autre bout du couloir, sans les mecs à chaîne).
On a des réunions de groupe, animées par monsieur Ferrand (que Magali surnomme « le maréchal », lol) qui nous dit quoi voter, à qui il ne faut pas parler, à quelle heure on peut rentrer de déjeuner.
Et puis il y a les commissions. Ça veut pas dire qu’on fait les courses pour manger, il y a une cantine tout ce qu’il y a de bien, non, c’est d’autres réunions, avec les députés des autres partis, ceux qu’on a ratatinés l’an dernier et qui tirent des tronches si longues qu’il a fallu raboter les tables pour qu’ils peuvent s’asseoir. Bon moi on m’a mis dans la commission des finances, pour sûr parce que j’y entrave que pouic ! Comme ça je lève la main comme le président de la commission il le fait et « le maréchal » ou son commis me font un sourire pour dire que j’ai bien voté. Tout le monde est gentil, même les députés du FN, mais il faut faire semblant de pas les connaître. Pour des nazis ils sont très comme il faut. Alors que les gens de la Transe Insoumise, et bien, ils sont moins aimables, et pas très soignés. J’aimerais pas qu’ils soient la majorité, on passerait un sale cardeur.
La cuisse de Jupiter
Mais bon, on fait avec, on est les représentants du peuple, merde quoi ! C’est Magali qui me sert de poison-pilote, elle a une longue habitude de la politique : tu penses ! trois campagnes électorales qu’elle a fait avec son député sorti, à coller des timbres quand elle avait encore de la salive et des affiches quand il y en avait plus. Elle est copine avec un député qu’elle croyait « des français de l’étranger », c’est les planqués qui sont partis pour payer moins d’impôts. En fait il est élu du 9-3, c’est les étrangers de France. Quand il parle on comprend pas tout, les dames qui ont Parkinson et qui tremblotent au-dessus des petites machine à écrire sont obligées de lui demander de répéter. Alors il se vexe et menace de retourner au PS. Si ça existe encore.
Bon on vote des lois qu’on nous a dit qu’elles étaient prévues dans le programme du président. On a eu une formation pour savoir sur quel bouton appuyer quand faut voter. C’est un questeur qui a tout organisé, Magali avait prévu de la monnaie à lui donner, elle avait entendu « quêteur ». Dommage qu’on puisse pas rigoler en séance surtout quand il y a la télé. Sauf quand le maréchal rit, alors on se lâche.
Et puis il y a monsieur Castaner, beau garçon, j’irais bien bourrer les urnes avec lui. Lui, il est tout : ministre, présentateur télé, chargé des relations avec nous. Quand il parle, même le maréchal écoute, et c’est pas son point fort. On dit que monsieur Castaner c’est l’homme qui murmure à la cuisse de Jupiter ! Alors quand il parle on se la boucle. Même Magali. C’est tout dire.
Peau-de-chien
Quand je pense que je me suis inscrite au Modem parce que le secrétaire fédéral était au cours de Salsa avec moi. Et qu’il a même pas été suppléant ! Tu te figures ! Moi la petite cadre C territoriale: députée ! Putain comme dirait Papy s’il était encore en vie.
Tu peux être fière de ta ptiote, Mémé, elle est aux manettes, sans grande compétence, mais c’est pas cela qu’on nous demande. On est le peuple, merde, manquerait pas qu’en plus faudrait qu’on soye premiers de classe !
Ni de gauche ni de droite, on est en marche.
C’est marrant, chaque fois que je dis « ni-ni », je pense à un collègue, qui a que ces mots-là à la bouche, Magali l’a surnommé « Peau-de-chien », je sais pas pourquoi mais ça lui va comme un gant.
En tout cas, sois certaine que j’ai un métier qui me va : pas trop de prise de tête, billets de train gratuits, courbettes quand je me pointe. On est des cocons-pâte.
Bon, allez, faut que j’y vais, on retourne en séance, je sais pas ce qu’on va débattre, mais on va bien voter je te jure. On fait que ça : on redresse le pays et c’est tordant.
Bisous tout plein. »
2 Commentaires sur "Pantouflette et Peau-de-chien (1)"
Tibor Skardanelli 23 novembre 2017 (21 h 54)
J’a bien rigolé !
Oncle Charly 23 novembre 2017 (22 h 19)
Ah c’est bon !